Francis Cabrel en cinq chansons

« Petite Marie » (1974)

Il y a cinquante ans donc, Cabrel, 21 ans, s’inscrit à un concours de chanson organisé par Sud Radio, une radio privée très écoutée dans sa chère région, le Sud-Ouest. Le jeune chanteur originaire d’Astaffort déboule donc à Toulouse et remporte le concours avec sa chanson « Petite Marie », dédiée à sa femme Mariette. Prix : 2000 francs, et une signature un peu plus tard sur le label CBS, chez qui il sort, en 1977, son premier album, « Les Murs de poussière ». S’y trouve évidemment « Petite Marie »… Sauf que Cabrel n’aime pas la façon dont CBS y a gommé son accent méridional. Il attendra 14 ans (!) pour finalement la sortir en single, dans une version live… Avec l’accent et le succès qu’on lui connaît.

« Je l’aime à mourir » (1979)

En 79 Cabrel sort son deuxième album, « Les Chemins de traverse », et c’est un carton plein grâce à cette chanson, sa plus grosse vente single… Même Shakira la reprendra en 2011, en espagnol, d’autant que Cabrel est lui-même coutumier de l’exercice : en 1980 il s’était déjà essayé à la reprise de ses propres chansons en espagnol avec l’album « Todo Aquello Que Escribí », suivi d’un deuxième en 1998 (« Algo más de amor »)… Et si vous n’aimez pas la version de Shakira, vous pouvez toujours vous rabattre sur celles d’Alliage, de Roch Voisine ou de… Patrick Sébastien.

« Il faudra leur dire » (1986)

Une bien belle chanson qu’il a écrite pour le baptême de sa fille Aurélie. Créditée à « Cabrel et les enfants », c’est somme toute un de ces hymnes pleins d’espérance typiques des eighties, avec des chœurs d’enfants et des paroles à l’avenant (l’amour, la transmission, la famille, etc.). Un an après « En l’an 2001 » de Pierre Bachelet et cinq ans avant « Heal the World » de Michael Jackson, Cabrel signe donc un nouveau succès qui résonner longtemps dans toutes les fancy fair et fêtes de communion de Navarre et d’ailleurs. Même Ray Charles en fera une cover, c’est dire.

« La Corrida » (1994)

Probablement son plus grand morceau, tout en langueur et retenue, porté par un texte devenu iconique, avec cette phrase qui revient telle une ritournelle désabusée, condamnant nos pires faiblesses, notre médiocrité : « Est-ce que ce monde est sérieux ? ». Chanson-totem et charge poétique anti-corrida, écrite du point de vue du taureau, « La Corrida » ouvre le splendide « Samedi soir sur la Terre », son meilleur album et son plus grand succès public et critique (4 millions d’exemplaires vendus). Samplé depuis lors par Booba et cité dans un texte de proposition de loi visant à abolir la corrida, c’est ce qu’on appelle un classique intemporel.

« Un morceau de Sicre » (2023)

Cinquante après le gros lot remporté au concours Sud Radio, Cabrel, à 70 ans, sort un morceau inédit qui rend hommage à Toulouse la ville rose, là où tout a commencé. Une boucle bouclée, et une jolie chanson qu’il a pressée en 45 tours collector, sur le label de sa fille Aurélie (Baboo Music). Et le Sicre du titre c’est son copain Claude Sicre, du groupe occitan Fabulous Trobadors, l’un des inspirateurs d’« À l'aube revenant », son dernier album : « Un jour il est venu enregistrer chez moi », raconte Cabrel, « et en guise de cadeau de remerciement, il m’a offert des livres sur la poésie des troubadours, une poésie que je ne connaissais pas. Il m’a dit : il faut que tu fasses un album complet sur les troubadours. Ces gens-là sont les rock stars du Moyen-Âge ! ». Cabrel, lui, n’a rien d’une rock star, mais ça ne l’empêche pas d’être l’un des plus grands auteurs-compositeurs de la chanson française populaire. Sérieux.